Le client de la librairie ne peut pas s’empêcher de penser, rien qu’en voyant la couverture de ce « conte de Noël pour adultes », au mystère de la disparition de l’avion de Malaysia Airlines. S’il espère, en achetant ce livre, plonger dans les rebondissements aventureux de la série télé « LOST », il sera surpris…mais pas déçu pour autant. Car l’auteur, dont nous connaissions déjà les ouvrages pédagogiques humoristiques, a laissé courir sa débordante imagination en nous racontant l’incroyable aventure de Pierre PIGNAN, personnage récurrent de la bibliographie de Patrick PAITEL.
Ce dernier va se retrouver, comme tous les autres passagers du vol, assigné à résidence dans un archipel paradisiaque où hommes et femmes, débarrassés de tous soucis matériels, n’ont qu’une – douce – obligation : procréer une nouvelle génération d’humains, plus libres et plus heureux que ce qu’ils étaient eux-mêmes avant d’arriver sur l’archipel.
La première fantaisie de l’auteur est d’avoir envoyé en mission dans cet avion un personnage de livres, sorte d’avatar de son auteur, qui va découvrir pour la première fois l’amour, la pétanque et les soucis liés à la difficulté de devenir père ! Mais les personnages « réels » ne sont pas moins croustillants, qu’il s’agisse du « Grand Chtarbé » dont on finira par connaître le vrai nom, qui a créé ce paradis artificiel, ou de l’hôtesse de l’air asiatique Laïli qui sera l’initiatrice dont chaque homme rêve. Il serait regrettable de raconter la fin de cette folle histoire. On se contentera d’admirer le toupet du « prolifique auteur » qui pratique l’autodérision, et trouve le moyen de se faire déborder par… mais chut ! Il ne faut pas rompre le charme de la découverte du lecteur!
Plutôt qu’un conte de Noël, le lecteur a parfois l’impression de découvrir une jolie fable, avec sa « morale » intégrée. Car sous le masque de la comédie, Patrick PAITEL creuse les thèmes qui lui sont chers : le refus du prosélytisme religieux, la soif de culture et d’ouverture aux autres. Malgré ce désir d’ouverture, le long séjour de l’auteur dans l’archipel des ex-Nouvelles Hébrides, lui a laissé aussi une légère anglophobie ! Mais on lui pardonnera cette faiblesse, puisque dans sa carrière de pédagogue, comme d’auteur de livres, il n’a de cesse de promouvoir la langue française qui est ici, d’une certaine façon, la vedette du conte.
S’il est vrai que nous terminons la lecture de ce livre en riant, il nous laisse toutefois comme une nostalgie de paradis perdu. Bien longtemps avant de devenir résident marquisien, Jacques BREL écrivait ces lignes qui nous reviennent à la mémoire, en lisant l’ « Archipel de la Renaissance » :
« Une île
Une île au large de l'espoir
Où les hommes n'auraient pas peur
Et douce et calme comme ton miroir
Une île
Claire comme un matin de Pâques
Offrant l'océane langueur
D'une sirène à chaque vague. »