« A mort », le dernier roman de Patrick PAITEL est beaucoup plus que la confession d’une femme alcoolique. Si le cliché n’était pas aussi usé, on parlerait de « descente aux enfers ». Car c’est bien de cela qu’il s’agit, d’une déchéance qui nous bouleverse, comme elle bouleverse, dans cette histoire, ceux qui aiment cette femme. Le premier niveau de lecture, qui peut tous nous concerner, c’est le thème de l’addiction et particulièrement de ce que les spécialistes appellent l’alcoolisme « pervers » par opposition à l’alcoolisme « mondain ». La dissimulation, les mensonges forment un enchaînement irréversible qui ménera cette femme vers la mort.
Mais on peut aimer ce livre aussi pour d’autres raisons. Sans que son auteur ait cherché à souligner l’aspect sociologique – l’alcoolisme sévit dans tous les milieux – on ne peut qu’être ému par la tentative désespérée de cette femme d’échapper à son milieu familial, en partant dans un lointain pays. « Nul ne guérit de son enfance » peut-on rappeler, et une lourde hérédité va continuer de peser sur elle.
« A mort » est aussi un roman d’amour, un amour surprenant, reliant deux êtres que leurs cultures respectives ne prédestinaient pas à cette relation. Si cette histoire est aussi pathétique, c’est que contrairement à la fin d’un film hollywoodien, l’amour de son homme ne sauvera pas cette femme. Et l’on aura assisté au contraire à l’apparition de la haine chez celle qui refuse d’être secourue.
Le style du livre est surprenant. Il est rare de lire une confession faite par un personnage un peu frustre, qui écrit comme elle parle. On en est d’abord un peu choqué, mais très vite, on comprend toute l’humanité de cette femme simple, qui a aimé, qui est aimée, mais qui va progressivement rejeter et détester tous ceux qui l’empêchent d’assouvir son vice.
« A mort » est présenté comme un « roman ». On imagine mal un auteur écrivant un tel livre, uniquement pour faire un exercice de style. Si, partant d’une histoire vécue, il a pu nous alerter sur la nécessité d’être attentif à nos proches, ce glaçant témoignage n’aura pas été inutile.
Elle est si présente cette femme, si crue, si violente. Elle a tant souffert, s'accrochant à de si minces bonheurs au milieu d'un tourbillon de souffrance.
J'ai commencé à lire et n'ai pu m'arrêter qu'à la fin.
Je suis sous le choc, au bord des larmes et j'ai lu la fin... comme une délivrance.
Le style est extrèmement vivant, on le lit en entendant cette voix, avec l'accent gouailleur, provocateur, hurlant pour ne pas entendre le silence, pour couvrir les reproches...