La guerre n'a pas épargné les lettres françaises. Des noms, imprimés hier sur la couverture d'un livre pour en imposer le succès, sont inscrits maintenant sur une croix de bois comme une suprême parole d'héroïsme. La leçon de ces morts est celle que l'histoire enseigne aux hommes qui veulent connaître le secret de la durée. Magnifique et lointaine destinée : tous ont été grands ; tous ont obéi à l'appel de la France, sans être effleurés par un murmure, acceptant de combattre pour les idées qu'ils avaient semées, pour les œuvres qu'ils avaient aimées et conçues, pour la renommée qui les avait sacrés ; tous, depuis le comte Albert de Mun, qui, chaque matin, sonnait la charge des âmes et dont le cœur s'est brisé sous la poussée d'un impérieux espoir, jusqu'aux plus humbles parmi les écrivains, artisans quotidiens de la pensée, rompus depuis longtemps à la silencieuse discipline du courage