"Crainquebille, dit Pierre Dumayet dans la lecture qu'il a faite de ce récit, est un film que Charlie Chaplin a oublié de tourner." Et il est vrai que cette sotie ou, si l'on préfère, ce fabliau raconte sur un mode souvent chaplinesque les démêlés d'un marchand de quatre-saisons avec un agent de police, et son innocence bafouée devant la justice des riches et le langage des puissants. Mais on est alors en pleine affaire Dreyfus - Crainquebille fut publié pour la première fois en 1903 -, et cette dénonciation d'un faux esprit des lois en même temps que de l'étroi-tesse bourgeoise, est bien dans la manière d'Anatole France dont l'œuvre entière est marquée au coin d'une ironie subtile et d'un scepticisme bienveillant, et qui demeure un exemple d'ironie dans l'écriture et d'élégance dans le style.