ON ſera peut-être ſurpris que j'aie oſé mettre mon nom à un livre aussi hardi que celui-ci. Je ne l'aurois certainement pas fait, ſi je n'avois cru la Religion à l'abri de toutes les tentatives qu'on fait pour la renverſer ; & ſi j'euſſe pu me perſuader, qu'un autre Imprimeur n'eût pas fait très volontiers ce que j'aurois refuſé par principe de conſcience. Je ſai que la Prudence veut qu'on ne donne pas occaſion aux Esprits foibles d'être ſéduits. Mais en les ſuppoſant tels, j'ai vu à la première lecture qu'il n'y avoit rien à craindre pour eux. Pourquoi être ſi attentif, & ſi alerte à ſupprimer les Argumens contraires aux Idées de la Divinité & de la Religion ? Cela ne peut-il pas faire croire au Peuple qu'on le leure ? & dès qu'il commence à douter, adieu la conviction, & par conſéquent la Religion ! Quel moien, quelle eſpérance, de confondre jamais les Irréligionnaires, ſi on ſemble les redouter ? Comment les ramener, ſi en leur défendant de ſe ſervir de leur raiſon, on se contente de déclamer contre leurs mœurs, à tout hazard, sans ſ'informer ſi elles méritent la même cenſure que leur façon de penſer.